Posté le 26. oct, 2013 par
Stéphane Riand
Sport
Moi, l’étranger, au milieu des Catalans pour le Clásico de l’indépendance
Il n’est pas 17 heures. Samedi 26 octobre 2013. Je suis à l’intérieur
de l’enceinte du Camp Nou. Dans une heure, le FC Barcelone, celui de
Xavi et de Iniesta, de Puyol et de Busquets, le Barça d’aujourd’hui, en
communion intime avec les Barca de Pep Guardiola, de Tito Vilanova, de
Robson, de Rickjard, de Cruyff, de tous les sutres, ce Barca que même
Franco n’a pas pu dissoudre et abattre affronte dans ce Clásico de
l’indépendance le Real Madrid de Carlo Ancelotti.
Ce match n’est pas un Clásico comme les autres. C’est le Clásico de
l’indépendance. C’est le Clásico de ce moment où la Catalogne n’est déjà
plus espagnole, où l’Espagne a déjà perdu Barcelone, Girona et
Tarragone, où le Roi et la corrida ont disparu du vocabulaire catalan,
où la Catalogne brille de sa liberté, où l’Espagne pleure sa corruption,
ses vilenies passées, ses agressions et ses assassinats. La Catalogne,
elle, ne veut plus être une colonie de l’Espagne, pillée, ignorée,
critiquée, fiscalement assommée. La Catalogne veut être libre,
indépendante et fière d’elle. Et la route vers l’indépendance, qui a
passé par le 11 septembre 2013, qui s’achèvera par la proclamation
unilatérale de sa liberté le 11 septembre 2014, passera par le
plébiscite populaire et, ce soir, par ce match de l’indépendance.
On sent un frémissement populaire indéfinissable. Le Catalan attend
la déclaration d’indépendance depuis 300 ans. Il ne faillira pas. En
mémoire des morts de jadis, des héros du passé, du premier d’entre eux,
Lluis Companys, en mémoire de ceux qui ont dû quitter leur terre natale
sans jamais pouvoir y revenir, en mémoire de tous ceux qui ont transmis à
leurs enfants cette langue à jamais ancrée dans le coeur, la chair et
l’esprit des Catalans. Visca Catalunya. No pasaran. C’est avec tout
cela, avec plus encore, avec leur âme que la Catalogne du
Barca entrera dans moins d’une heure dans ce stade qui chantera au-delà
des mers et des temps l’hymne du Barca. Ce n’est plus une question de
nationslité, de prédominance, de suprématie, de vengeance. C’est une
question de vérité et d’équité vis-à-vis de soi-même. La Catalogne sera
ce soir dans le coeur de Xavi Hernandez, qui avec son brassard de
capitaine (ou sera-ce Puyol ?) sera pour 90 minutes le président acclamé
de toute la Catalogne. Une carrière sportive exemplaire et cette
récompense et cette responsabilité d’être celui qui, en serrant la main
du Madrilène Ramos (ou sera-ce le grand retour de Casillas ?) saura lui
dire adieu. Le Real reviendra au Camp Nou mais ce sera dans un autre
pays. L’Europe ne veut rien en savoir encore, mais la Catalogne déjà
n’est plus là.
Le Barca est prêt à vaincre, à perdre, à partager l’enjeu. Prêt à
tout. Ce club, qui est plus qu’une équipe, gagnera, perdra, fera match
nul.
Mais avec son âme catalane.
http://1dex.ch/2013/10/26/moi-letranger-au-milieu-des-catalans-pour-le-clasico-de-lindependance/